Le Bore-out ou Syndrome d'épuisement professionnel par l'ennui
Ennui, désintérêt, le bore-out est à l’opposé du surmenage professionnel. Pourtant, les conséquences sont les mêmes et peuvent mener à la dépression.

On connaissait le phénomène du burn-out. Un terme qui apparaît au début des années 1970 et qui désigne l’épuisement professionnel dû à une surcharge de travail, un stress trop important ou un surinvestissement touchant souvent les personnes ayant un poste à responsabilités.

Le bore-out apparaît comme étant le contraire du burn-out. Manque de travail, réalisation de tâches ingrates ou ennuyeuses… il affecterait couramment les individus travaillant en entreprise et notamment dans le secteur tertiaire. Bien que les causes soient opposées, les victimes du bore-out comme du burn-out peuvent vivre un manque important de motivation, ressentir une grande fatigue et avoir la sensation que leur travail perd de son sens.

Le bore-out ou succomber au mortel ennui

Le concept du bore-out apparaît pour la première fois en 2007, dans l’ouvrage Diagnose Boreout, rédigé par Peter Werder et Philippe Rothlin, deux consultants en management. Les auteurs en décrivent non seulement les impacts sur les victimes (le manque de stimulation intellectuelle et la perte d’estime personnelle), mais aussi les mécanismes qui leur permettent de composer avec la situation.

Selon leur théorie, ce ne serait pas tant le stress qui constituerait le principal problème d’un grand nombre de travailleurs mais plutôt l’absence de tâches signifiantes.

Diagnostiquer le bore-out

Le syndrome d’épuisement professionnel par l’ennui se caractérise par trois éléments : l’ennui, l’absence de défis et le désintérêt.

Les auteurs s’opposent cependant à réduire l’employé démotivé à un paresseux. Au contraire, celui-ci serait frustré de se trouver dans l’incapacité de contribuer au développement de son entreprise et de mettre à profit ses compétences et connaissances.

Alors pour savoir si vous êtes vous-même atteint du syndrome bore-out, répondez honnêtement aux questions suivantes issues de Diagnose Boreout :

  • Au travail, passez-vous du temps à des occupations personnelles ?
  • Êtes-vous sous-investi ou vous ennuyez-vous ?
  • Vous arrive-t-il de faire semblant de travailler alors que vous n’avez rien à faire ?
  • Êtes-vous fatigué le soir alors que votre journée n’a pas été stressante ?
  • Êtes-vous malheureux dans votre travail ?
  • Trouvez-vous que votre travail n’a pas de sens ?Pourriez-vous finir votre travail plus vite que vous ne le faites ?
  • Avez-vous peu ou pas d’intérêt pour votre travail ?

Selon leurs auteurs, quatre réponses affirmatives à ces questions signifient que vous souffrez certainement de bore-out, ou êtes en passe d’y succomber.

De l’ennui au travail à la dépression

Ce phénomène a tendance à être négligé par les chercheurs comme par les employeurs en raison de la stigmatisation sociale attaché au bore-out et à ses effets. C’est en effet le stress qui est devenu un marqueur de statut sur le lieu de travail.

Les conséquences du bore-out pour les employés sont nombreuses : insatisfaction, épuisement, ennui, faible estime de soi. Le paradoxe du bore-out est que, malgré le dégoût de leur situation, les employés se sentent incapables de demander des tâches plus stimulantes, de soulever le problème avec leurs supérieurs, ni même de chercher un nouveau travail.

Ceci ce justifie notamment par la peur d’être licencié qui empêche l’employé d’attirer l’attention sur le caractère superflu de son poste. Ainsi, l’un des effets du bore-out sera de pousser l’employé à « faire semblant » de travailler, en utilisant tous les subterfuges nécessaires tels que laisser ouvertes des feuilles de calculs sur son écran d’ordinateur, couvrir de dossiers son bureau pour faire croire à un surcroît d’activité.

Si cet état se prolonge plusieurs mois voire plusieurs années, il peut plonger progressivement l’employé dans un état proche de la dépression et lui faire perdre toute estime de soi.

Faire semblant de travailler pour exister

Les auteurs de l’étude décrivent le phénomène de l’intérieur : ces heures passées à naviguer sur le Web, un document de travail ouvert par précaution sur une fenêtre. Ces pauses cigarette interminables. Ces départs du bureau, l’attaché-case gonflé à bloc, pour feindre des heures supplémentaires inexistantes.

Cette attitude trouve son explication dans les mœurs de notre société. En effet, il est de bon ton d’être surchargé de travail, et les souffrances dues à un stress pathologique sont plaintes, mais admises. La maladie inverse, parce qu’elle est confondue à la paresse dans ses manifestations, subit, elle, un tabou.

Quoi qu’il en soit, un problème mérite d’être soulevé, à savoir ce besoin social d’afficher un état de suractivité et de stress comme preuve de sa réussite professionnelle.

Depuis quelques années, les études ont fleuri en Europe et aux Etats-Unis pour repérer les victimes de ce « nouveau » mal. En 2005, l’entreprise suisse Kelly Services publiait une étude* : 10% des employés interrogés déclaraient souffrir de l’ennui dans leur travail. La même année, 33% des personnes interrogées par AOL et Salary.com faisaient un aveu similaire en trouvant n’avoir pas suffisamment de travail.

Ainsi, lorsqu’on analyse le marché du travail, on réalise qu’il n’y a pas seulement que les chômeurs qui sont payés à ne rien faire.

Comment vaincre le bore-out : les questions à se poser

La première chose à faire est de comprendre la source réelle du problème. Il peut être profitable d’avoir une conversation franche avec son patron pour envisager avec lui des pistes de solution. Il se peut toutefois que le malaise soit tellement profond qu’un changement majeur s’impose. Il se peut enfin que le problème ne soit pas relié au travail : une personne en dépression ressentira de l’ennui, peu importe sa situation.

Il apparaît crucial, lorsqu’on occupe un emploi qui ne nous convient pas ou qui n’est pas lié à nos champs d’intérêts, d’agir pour remédier à la situation, par exemple en consultant un conseiller d’orientation. Certes, tout changement demande une certaine énergie. Mais souvent, le fait de penser aux nombreuses années de travail qu’il nous reste peut nous aider à entreprendre une démarche constructive.

Il est important d’ajouter que l’ennui ressenti au travail peut aussi être lié à une certaine routine et cette notion est en partie subjective. La perception de la routine peut être suscitée par un besoin personnel de stimulation. Certaines personnes doivent se trouver constamment en situation de changement pour se sentir bien. La perception de routine peut également être liée aux intérêts professionnels. Certains cas de bore-out peuvent donc être attribués davantage à une problématique d’orientation professionnelle qu’à un emploi inadapté.

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