Les devoirs du courtier ont des limites en matière d'évolution du risque
Dans son arrêt du 17 février 2021, la Cour de cassation vient rappeler un principe important pour les courtiers en assurance : c’est à l’assuré de penser à déclarer une évolution du risque et de faire adapter le contrat. À défaut, celui-ci n’est pas fondé à recourir contre le courtier pour manquement à son devoir de conseil. Cas d'espèce par Morgane Hanvic, avocate associée chez Lexance Avocats.
LA RÉDACTION
\ 16h53
LA RÉDACTION
Les faits
En l’espèce, une société civile immobilière avait souscrit, par l’intermédiaire d’un courtier, un contrat d’assurance habitation couvrant notamment le risque de vol à hauteur de 400 000 € pour le contenu, avec une limite de 60 000 € par sinistre pour les objets précieux.
À la suite d’un vol, un sinistre a été déclaré et le préjudice au titre des objets précieux a été évalué à 214 461 €. L’assureur a néanmoins opposé un plafond de garantie s’agissant des objets précieux, limitant l’indemnisation à 60 000 €. Il est apparu que si l’exactitude de la déclaration du risque à la souscription n’était pas contestée, le risque avait évolué en cours de contrat, l’assuré ayant fait l’acquisition de nombreux nouveaux bijoux.
L’assuré assignait le courtier sollicitant sa condamnation à lui payer le différentiel d’indemnité en lui reprochant de n’avoir pris, pendant sept ans, aucune disposition pour vérifier l’adéquation des garanties aux valeurs à assurer et ne pas avoir attiré l’attention de son assuré quant à la nécessité de revoir ses garanties en cas d’évolution des valeurs.
La décision
La cour d’appel (CA Paris, pôle 2 - ch. 5, 2 avr. 2019, n° 18/03227) avait relevé que l’assuré avait reçu en cours de contrat une lettre de l’assureur l’invitant à vérifier les montants assurés et en cas de besoin à contacter son courtier. Rappelant sa jurisprudence selon laquelle il n’appartient pas à l’intermédiaire de répéter une information claire et précise, la cour d’appel a relevé que l’assuré n’avait pas informé le courtier de ses achats de bijoux pour des sommes importantes et que l’intermédiaire ne pouvait le conseiller utilement à ce titre. Estimant que le courtier n’avait commis aucune faute, la cour avait confirmé le débouté de première instance.
le commentaire
La Cour de cassation a alors estimé que les juges d’appel avaient à juste titre énoncé que « le courtier n’est pas tenu de s’informer périodiquement de l’évolution du risque et qu’aucune faute ne pouvait être reprochée à l’intermédiaire au titre de son devoir de conseil », rejetant le pourvoi formé par l’assuré. Cet arrêt s’inscrit dans la lignée de la jurisprudence de la Cour de cassation, mais fait néanmoins office d’un rappel bienvenu. L’article L. 113-2, alinéa 1, 3° du code des assurances impose à l’assuré de « déclarer, en cours de contrat, les circonstances nouvelles qui ont pour conséquence soit d’aggraver les risques, soit d’en créer de nouveaux et rendent de ce fait inexactes ou caduques les réponses faites à l’assureur, notamment dans le formulaire », formulaire rempli lors de la déclaration initiale, l’assureur ayant dans ce cas trois options : résilier le contrat, le maintenir sans surprime, le maintenir avec surprime. Il s’agit donc d’une obligation légale spontanée, à vocation générale, opposable également par l’intermédiaire d’assurance, comme vient le rappeler la Haute Juridiction dans cet arrêt. Dans de nombreux litiges portant sur les valeurs assurées, les juges posent des limites aux argumentaires parfois originaux d’assurés invoquant des manquements de la part du courtier, lorsque l’assureur décide, en cas de sinistre, d’appliquer une règle proportionnelle de prime ou de capitaux venant réduire l’indemnité perçue.
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