Travail dans le secteur privé : quelles assurances contre la perte de revenus ?

Publié par François Anglade  |  Mis à jour le par

Maladie qui n'en finit pas ou accident, il faut parfois ajouter aux dépenses de santé le manque à gagner occasionné par un arrêt de travail. Pour s'en prémunir, il est possible de s'assurer. Mais tout le monde n'y a pas intérêt.

En cas d'arrêt de travail, les complémentaires santé ne sont pas d'un grand secours, car elles n'interviennent que pour les remboursements de frais de santé. Ce n'est donc pas sur elles qu'il faut compter lorsque le médecin délivre un arrêt de travail, qui risque pourtant de se traduire par une perte de revenus.

Avant de s'assurer pour couvrir ce risque, il est préférable de connaître les protections légales existantes. Elles peuvent s'avérer suffisantes dans bien des cas.

Les indemnités de la Sécurité sociale

Tout d'abord, la Sécurité sociale intervient en versant, à compter du quatrième jour d'arrêt pour les salariés du régime général, des "indemnités journalières". Pour un arrêt inférieur à 6 mois, elles sont versées aux personnes qui ont travaillé au moins 150 heures au cours des trois mois précédant l'arrêt de travail, ou qui ont cotisé l'équivalent d'au moins 1 015 fois le Smic horaire lors des six derniers mois.

Pour compléter, les conventions collectives peuvent prévoir le versement d’indemnités supplémentaires. Il faut généralement être présent dans l'entreprise depuis au moins trois à six mois pour y prétendre.

Des montants plafonnés

Le montant des indemnités de la Sécurité sociale est cependant plafonné. Il correspond à 50 % de votre salaire journalier de base (moyenne des salaires bruts des 3 derniers mois précédant l’arrêt, 12 mois en cas d'activité saisonnière), dans la limite de 1,8 fois le Smic mensuel, soit 2 885,62 € bruts en 2022. Résultat, cette indemnité est limitée à 47,43 € bruts par jour.

Un complément versé par l'entreprise

La Sécurité sociale ne laisse pas sans ressources, mais les sommes qu'elle verse ne permettent souvent pas de maintenir le train de vie du ménage. En outre, son intervention est limitée en durée : 360 indemnités journalières au maximum sur trois ans. A noter : Si l’assuré souffre d’une affection de longue durée (ALD), les indemnités peuvent être versées pendant trois ans.

C'est pourquoi la loi a imposé aux employeurs d'aller plus loin, et de nombreuses conventions ont été négociées entre partenaires sociaux dans la plupart des branches professionnelles afin de renforcer cette protection. Ainsi, certaines entreprises doivent verser un complément d'indemnité afin de s'approcher le plus possible du niveau de salaire réel et d'éviter la chute des revenus.

Des variables d'une branche à l'autre

Les modalités et les droits de chacun varient beaucoup selon le statut (cadre ou non-cadre) et la branche d'activité : certaines conventions collectives prévoient un maintien du salaire pendant trois ou six mois, puis une décroissance régulière ou un arrêt brutal, alors que d'autres n'interviennent qu'à compter d'une certaine durée d'arrêt.

Dans ce domaine, chacun a intérêt à se renseigner sur la protection dont il dispose, en interrogeant la direction des ressources humaines de son entreprise ou en lisant la convention collective à laquelle il est rattaché.

S'assurer pour mieux se protéger

Si les réponses laissent apparaître une faible protection, il reste une solution : s'assurer individuellement auprès d'une compagnie d'assurances pour compléter ses revenus en cas de besoin.

Elles sont nombreuses à proposer de telles garanties, en option de la complémentaire santé ou dans des contrats spécifiques dits "d'indemnités journalières". Les tarifs varient de quelques dizaines d'euros par an à plusieurs milliers, selon la couverture et le profil de l'assuré.

Maladie ou accident ?

De tels contrats peuvent prévoir de n'intervenir qu'en cas d'accident, ou bien pour couvrir les arrêts dus aussi bien à une maladie qu'à un accident. Cette dernière formule est nettement préférable, car les conséquences d'un arrêt sont les mêmes financièrement quelle que soit son origine.

Il faut ensuite choisir le montant de la garantie (exprimée, comme pour la Sécurité sociale, sous forme d'une indemnité quotidienne) en fonction des besoins à couvrir et du budget à y consacrer.

Faire le point sur ses besoins

Les assureurs proposent des contrats offrant de 10 € à plus de 300 € d'indemnités par jour, afin de répondre à l'ensemble des situations. Dans la mesure où le tarif progresse proportionnellement au montant de l'indemnité journalière versée, il est préférable d'avoir fait un point précis sur les besoins au préalable et de choisir une couverture parfaitement adaptée, c'est-à-dire ni trop étroite, ni trop large.

La plupart des contrats prévoient que cette indemnité est versée tant que l'assuré est en incapacité de travail, avec une limite de trois ans au maximum.

Bien choisir la date d'indemnisation

Un élément très important entre aussi en jeu : le choix de la date à partir de laquelle l'indemnisation se met en marche. Il est possible de souscrire des contrats qui indemnisent dès le premier jour d'arrêt, mais ils sont hors de prix et ne se justifient pas dans un ménage qui dispose d'une épargne de précaution pour faire face, justement, à un coup dur.

En général, les assureurs proposent de démarrer leur aide à compter de quinze ou trente jours d'arrêt consécutifs, voire après deux ou trois mois pour ceux qui sont bien protégés par leur convention collective. Cette "franchise" a un impact très important sur le prix : plus elle est longue et moins l'assurance coûte cher.

L'âge et l'état de santé influent sur le tarif

Le tarif varie également en fonction de l'âge de l'assuré et de sa profession. Une personne proche de la retraite paiera donc plus, à garanties égales, qu'un jeune actif.

L'état de santé, enfin, conditionne l'octroi ou non de l'assurance : il faut remplir un questionnaire de santé, et la compagnie se réserve la possibilité de ne pas accorder sa garantie ou d'exclure certains risques.

Elle peut aussi proposer d'accorder sa couverture en échange d'une prime supplémentaire (une "surprime") pour couvrir les conséquences d'une maladie déjà déclarée. Il ne faut donc pas attendre d'avoir des soucis de santé pour recourir à une telle protection, car il risque d'être trop tard.

Quand incapacité devient invalidité

Le bénéfice de l'assurance invalidité ne peut être garanti qu'aux assurés justifiant de certaines conditions administratives et médicales.

L'assurance invalidité tend à réparer la perte totale ou partielle d'origine non professionnelle de la capacité de travail ou de gain d'un assuré social. Le bénéfice d'une pension d'invalidité au régime général requiert une incapacité permanente et substantielle, d’au moins deux tiers, à exercer, dans une profession quelconque, un emploi à la mesure de ses capacités et rémunéré plus du tiers d'une rémunération normale.

Le demandeur doit être immatriculé depuis au moins douze mois à la Sécurité sociale et avoir exercé une activité professionnelle minimale au cours de l’année précédant l’interruption de travail ou la constatation de l’invalidité (600 heures de travail salarié ou des cotisations équivalentes à celles dues pour 2 030 SMIC horaires). Pour la détermination du taux de la pension d'invalidité, les invalides sont classés en trois catégories. Ce classement ne s'oppose pas à l'exercice d'une activité professionnelle. La pension est le produit du taux d'indemnisation par la moyenne des salaires annuels perçus au cours de ses dix meilleures années civiles d’activité. Les salaires pris en compte sont limités au plafond de la Sécurité sociale et revalorisés annuellement comme les pensions en fonction de l’inflation observée. La pension est encadrée par un minimum et un maximum. Elle est réduite (ou supprimée) en cas de cumul avec d’autres revenus.

Les assurés sociaux ne justifiant pas des conditions administratives ouvrant droit à l'assurance invalidité peuvent éventuellement obtenir l'allocation aux adultes handicapés (AAH).

Jusqu'au départ à la retraite

La pension d'invalidité dont le bénéficiaire n'exerce pas d'activité professionnelle est remplacée à l'âge légal de la retraite par une pension de vieillesse pour inaptitude.

Ces pensions d'invalidité sont souvent améliorées par des contrats de prévoyance supplémentaire souscrits par les employeurs au profit de leurs salariés. La plupart se déclenchent à partir d'un taux d'invalidité d'un tiers, et peuvent prévoir de verser jusqu'à 80 % du salaire d'activité jusqu'au départ en retraite.

Souscrire un assurance individuelle

À défaut d'une telle couverture, ou si elle est insuffisante, il reste la possibilité de souscrire une assurance individuelle qui joue le même rôle. Le montant de la rente accordée pour une invalidité absolue est réduit proportionnellement si l'invalidité est partielle. Il convient toutefois d'être vigilant, car certains contrats n'interviennent qu'en cas d'invalidité totale.

Ces assurances sont assez peu onéreuses, car le risque présente une faible probabilité de survenue. C'est pourquoi il n'est quasiment jamais possible de les souscrire seules : elles sont souvent proposées en complément logique d'une complémentaire santé ou de garanties d'indemnités journalières.

Indépendants, pensez aux contrats loi Madelin

Complémentaire santé, régime d'indemnités journalières et garanties d'invalidité : les cotisations payées pour toutes ces assurances peuvent être déduites des bénéfices imposables par les non-salariés dans la limite de 7 % du plafond de la Sécurité sociale (2 879,52 € en 2022) plus 3,75 % du bénéfice imposable, le tout dans la limite de 3 % de huit fois le plafond de la Sécurité sociale (9 872,64 € en 2022).

Ce dispositif réduit sensiblement le coût de ces protections, indispensables au vu des prestations versées par les régimes de prévoyance professionnels.

Les indemnités journalières versées éventuellement par l'assureur en cas d'arrêt de travail ou d'invalidité sont en revanche imposables, contrairement à celles des contrats individuels.

Le régime des accidents du travail

Les arrêts qui découlent d'un accident de travail bénéficient d'un traitement un peu plus favorable que ceux liés à une maladie. La Sécurité sociale intervient dès le premier jour d'arrêt et sans limitation de durée.

L'indemnité elle-même est un peu plus élevée et atteint 60 % du salaire de base (toujours dans la limite du plafond de la Sécurité sociale) pendant les 28 premiers jours, puis elle passe à 80 %. A noter que le salaire journalier est plafonné à 0,834 % du plafond annuel de la Sécurité sociale, soit au 1er janvier 2022 un salaire journalier plafonné à 343,07 €. L’indemnité maximum pendant les 28 premiers jours est donc égale à 205,84 € par jour et au-delà à 274,46 €, ce qui est sensiblement supérieur aux plafonds en cas de maladie (cf. ci-dessus).

Les accords collectifs prévoient souvent que les employeurs, dans ce cas, complètent les indemnités afin de maintenir la totalité du salaire pendant toute la durée de l'arrêt.

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