Hérault : l’escroquerie à l’emprunt au Crédit Mutuel de Sète devant la justice
L’affaire remonte à 10 ans. Des dizaines de prêts ont été accordées par la banque sans garanties ni contrats au bénéfice d’un commerçant sétois.
C’est une affaire d’escroquerie peu banale qui a été examinée cette semaine par les juges du tribunal correctionnel de Montpellier. Cette affaire de cavalerie à l’emprunt immobilier pour une somme de plus de 860 000 € remonte à 10 ans. Mais ses deux protagonistes, dont un ancien chargé de clientèle du Crédit Mutuel de Sète, n’ont été renvoyés devant la justice qu’en 2019. Par ailleurs, acculée par la situation, la femme du second prévenu, un propriétaire de bar-tabac PMU de Sète, avait mis fin à ses jours en 2011. Laissant des lettres où cette infirmière libérale dénonçait clairement les agissements de son mari et père de leur enfant de 4 ans à l’époque.
Des proches surendettés
Tout commence par un audit des comptes du Crédit Mutuel de Sète en 2010 où des anomalies comptables sont identifiées sur une centaine de prêts pour un encours total de 3 M€.
Les enquêteurs, des gendarmes spécialisés de la section de recherche mettront, notamment, en évidence pas moins de 863 000 € pour 38 prêts accordés sans contrat, à partir de faux documents ou à l’insu des bénéficiaires. Toujours validés par le même chargé de clientèle de la banque et la plupart du temps au nom d’employés ou même de proches du commerçant sétois, comme ses propres parents et le père de sa femme. Qui ont déposé plainte. Des personnes qui se sont retrouvées en surendettement massif, faute de ne pouvoir rembourser leurs créances de multiples emprunts immobiliers, servant à payer des biens acquis au nom de la SCI du mis en cause, les Marines du Sud (lire ci-dessous).
Prison ferme requise
De son côté, le commerçant sétois avait, au lendemain du suicide de sa femme en juin 2011, accusé la banque de l’avoir piégé, sa famille étant accablée de dettes. Mais c’est lui qui doit répondre aujourd’hui d’escroquerie avec son complice banquier (licencié pour faute grave mais qui a gagné son procès aux prud’hommes contre le Crédit Mutuel). Lui décaissait l’argent sans autre forme de vérification sur la solvabilité ou les garanties des clients.
À la barre, les deux mis en cause se rejettent la responsabilité de l’escroquerie. Le commerçant explique que c’est le banquier présenté via un notaire influent de la place de Sète qui lui a donné la "solution" à l’époque où il cherchait à acheter des machines à pop-corn pour son bar et qu’une autre banque refusait de le financer. "Pour trouver l’argent, le Crédit Mutuel m’a dit de revendre deux appartements de mon beau-frère mais ça ne se fait pas en 15 jours, alors en attendant la banque m’a débloqué l’argent", tente de se justifier le commerçant qui tombe ensuite dans un engrenage. Les frais s’accumulent "pour boucher un trou il fallait en faire un autre", dit-il.
Il faut trouver de nouveaux emprunteurs crédités par le Crédit Mutuel de sommes surévaluées au regard de la valeur des biens achetés. "Il y avait des proches à vous qui n’avaient pas la capacité financière ?", note le président du tribunal Philippe Lejeune. "On parle de 3 M€ de prêts avec des anomalies, il n’y a pas que moi", rétorque le commerçant qui a joué les intermédiaires mais réfute avoir fourni des faux. "Certains témoignages attestent que vous connaissiez le fonctionnement problématique de l’agence et que vous en avez profité ?" l’interroge le président du tribunal Philippe Lejeune. Réponse : " On m’a promis que ça allait se résoudre, mais ça ne s’est jamais résorbé." Le chargé de clientèle poursuivi pour complicité admet un manque de rigueur dans l’étude des garanties mais avoir cédé au commerçant sous les "menaces et harcèlement" voire "chantage". Il aurait lui aussi laissé des plumes financières dans l’histoire. Le procureur a requis cinq ans de prison dont trois de sursis probatoire sans mandat de dépôt et avec une interdiction de gérer définitive et privation des droits civils pour le commerçant. Trois ans de prison dont deux avec sursis probatoire et les mêmes interdictions pour le chargé de clientèle. Délibéré au 4 avril.
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