L’apport personnel - 10 %, parfois jusqu’à 20 % du montant du bien - ne suffit plus à décrocher un prêt immobilier. Pour tenir compte de la hausse générale des prix obérant la capacité de remboursement des ménages, les banques se font plus exigeantes. Beaucoup requièrent désormais l’existence d’une épargne après projet, de l’ordre de quatre à six mensualités de prêt, qui permette de faire face aux dépenses imprévues - une toiture qui prend l’eau, une chaudière qui rend l’âme ou une voiture à changer.
La crainte d’une panne sèche… d’argent
Cette précaution vise avant tout à protéger les ménages en limitant le risque d’endettement. Mais, couplée à la hausse des taux d’intérêt qui, selon les banques, ont grimpé de 0,3 à 0,6 % depuis janvier, cette intention vertueuse se transforme en casse-tête pour bon nombre d’emprunteurs. Notamment en Bretagne. En cause, l’attention accrue désormais portée par les banques, pour évaluer le reste-à-vivre, à la localisation du bien et à son éloignement par rapport au lieu de travail.
En Bretagne, c’est un peu la double peine
La consultation récemment menée en interne par Vousfinancer, qui regroupe près de 200 courtiers en crédit en France et travaille avec 94 banques partenaires, en atteste : « Nous avons eu des refus de prêt en raison de la charge financière trop importante que ces trajets quotidiens allaient représenter en termes de carburant, voire d’achat d’une deuxième voiture », fait valoir Sandrine Allonier, qui a dirigé cette étude. Selon ses estimations, ce budget représente, chaque mois, 500 euros pour un couple dont chacun des membres parcourt 100 km par jour. « Même à moins de 50 km, certains établissements rechignent et, pour faire face aux dépenses engendrées, limitent l’endettement maximum à 30 %, au lieu des 35 % autorisés. »
Éloignement, travaux, DPE…
« En Bretagne, c’est un peu la double peine, poursuit la porte-parole de Vousfinancer. Le prix de l’immobilier ayant flambé sur le littoral (+30 % en deux ans), les familles avec deux enfants qui rêvent d’une maison avec jardin n’ont pas d’autre solution que de s’éloigner à 30, 40 ou 50 km, nous a, par exemple, remonté notre agence de Lorient. » Qui plus est, la région cumule les handicaps : prépondérance des revenus modestes (agroalimentaire, restauration, aide à domicile…), télétravail moins développé que dans les grandes métropoles, diagnostics de performance énergétique entraînant des charges et des travaux supplémentaires dans l’ancien. Autant de postes de dépenses scrutés de très près par les banques, dans un contexte d’augmentation des prix de l’électricité, et du gaz mais également, des matériaux de construction et des devis d’artisans.
« Le robinet à crédits n’est pas fermé »
Résultat : un durcissement général dans la façon d’étudier les dossiers, constaté par 70 % des courtiers ayant pris part au sondage. Un apport personnel moyen de plus de 50 000 euros, en forte hausse sur un an (+78 %, selon Finance Conseil, un autre réseau de courtage). Des dossiers recalés pour cause d’apport ou d’épargne après projet insuffisants. Et des acquéreurs attentistes, ne sachant plus sur quel pied danser.
« Le robinet à crédits n’est pas fermé », assure toutefois Sandrine Allonier. D’autant plus vrai en Bretagne où les banques mutualistes, bien implantées, proposent aux jeunes de moins de 30 ans des conditions attractives, requérant moins d’apport personnel ».